La protection sociale pour un créateur ou repreneur
Notre activité est un cabinet d’expertise-comptable qui a pour spécialité l’accompagnement des créateurs ou des repreneurs d’entreprise de toutes tailles.
Le créateur ou le repreneur doit gérer non seulement l’économie de son projet, mais également opérer des choix essentiels sur le fonctionnement juridique, fiscal et social de sa future entreprise.
« 50 réponses pour un créateur ou un repreneur d’entreprise » apporte les éléments les plus attendus par les femmes et les hommes qui ont un projet d’entreprise.
Dans cet article, nous allons aborder la thématique de la protection sociale. Pour retrouver nos autres thématiques, n’hésitez pas à parcourir nos autres articles sur le sujet !
Voici les différents points abordés dans cet article de manière simple et concise :
– Travailleur non salarié ou protection sociale de type salarié ?
– TNS « Les indemnités journalières de maladie »
– TNS « La complémentaire retraite »
– Dirigeant « L’assurance perte d’emploi »
– TNS « La prévoyance décès et invalidité »
– TNS « La mutuelle »
– La protection sociale du dirigeant soumis au régime général
Travailleur non salarié (TNS) ou
protection sociale du type salarié ?
Aujourd’hui compte-tenu de l’évolution du droit des sociétés, vous avez le choix de votre type de protection sociale.
Il existe deux grands types de régime de protection sociale : le régime des travailleurs non salariés (TNS) et le régime général de la sécurité sociale.
Si le dirigeant bénéficie du régime général de la sécurité sociale, sa société éditera une feuille de paie pour lui comme pour un salarié. Son régime de protection sociale sera identique à celui d’un salarié cadre.
Suite à la publication d’un décret à l’été 2019, une allocation journalière « chômage » de 26.30 € (800 € par mois) pendant 182 jours (6 mois) maximum pourra bientôt être attribuée aux dirigeants d’entreprises.
Cette indemnisation « chômage » concerne :
– Les dirigeants salariés : gérants minoritaires de SARL, dirigeants de sociétés anonymes et de sociétés par actions simplifiées…
– Les travailleurs indépendants dont l’entreprise ou la société fait l’objet d’une liquidation ou d’un redressement judiciaire subordonné par le tribunal au remplacement du dirigeant : artisans, commerçants, exploitants agricoles, professionnels libéraux…
Mais sous conditions :
– Pouvoir justifier d’une activité non salariée, sur une période complète d’au moins 2 ans (au titre de la même entreprise avant la liquidation ou le redressement)
– Avoir perçu au moins 10 000€/an de revenus professionnels durant les 2 dernières années d’emploi
– Bénéficier de ressources (différentes de l’activité non salariée) inférieures à 559,74 €
– Etre à la recherche effective d’un emploi
Dans le langage courant, on parle de protection de type « salarié » même si le dirigeant ne bénéficie pas d’un contrat de travail.
Ce régime s’applique aux présidents et directeurs généraux (y compris adjoints ou délégués) des SA et SAS.
Ce régime s’applique aussi aux gérants de SARL qui ne possèdent pas avec leurs co-gérants, leur épouse (ou conjoint pacsé) et leurs enfants mineurs non émancipés plus de 50% du capital de la société. Il est alors appelé « gérant minoritaire ».
Pour les entrepreneurs individuels, les associés de SNC, les gérants majoritaires de SARL, les associés gérant d’EURL, …c’est le régime des travailleurs non-salariés qui s’applique.
Ce régime (qui est décrit ci-après) est particulier. Le dirigeant n’a pas de feuille de paie. Les associés de la société votent sa rémunération. Le dirigeant prélève alors cette rémunération sur les comptes en banque de la société.
La protection sociale du TNS « Les indemnités journalières de maladie »
Le régime travailleur non salarié (dit TNS) protège mal les dirigeants malades en termes d’indemnité journalière de maladie.
Le montant de l’indemnité journalière dépend de votre revenu annuel moyen basé sur les trois dernières années. Il ne pourra pas dépasser le plafond de la sécurité sociale, à savoir 52,90€.
Si votre revenu annuel moyen est inférieur à 3754€, vous ne percevrez pas d’indemnité. S’il est supérieur, vos indemnités correspondront à 1/730ème de celui-ci.
Ainsi, pour un revenu de 1 500 € par mois : l’indemnité journalière sera de
1 500 € x12 /730 x 30 jours = 740 € par mois.
Attention : pour percevoir une indemnité, il faut être à jour de ses cotisations est envoyer son arrêt maladie dans les 48 heures.
Pour certaines professions, il y a des régimes particuliers :
– la CARCDSF : 93,29€/jour pour les chirurgiens dentistes et entre 16,22€ et 46,28€/jour pour les infirmières;
– la CARMF : entre 64,67€ et 129,33€/jour pour les médecins;
– la CARPIMKO : 48,95€/jour pour les auxiliaires médicaux;
– la CNBF : 61€/jour pour les avocats.
Il est alors impératif de souscrire une assurance type « Loi Madelin ».
Développée par l’essentiel des compagnies d’assurances et des banques, cette forme d’assurance santé privée indemnise vos journées de maladie selon un montant prévu à votre contrat.
Bien entendu, plus le montant prévu en cas d’indemnisation est élevé, plus le coût de l’assurance est important.
Le cumul de l’indemnisation de l’assurance et du régime obligatoire ne peut pas conduire à percevoir plus que son revenu habituel.
Cette assurance peut être prise en charge par l’entreprise. Dans la limite d’un plafond de l’ordre de 3000 € par an, elle est déductible fiscalement. Mais elle sera assujettie aux charges sociales ainsi qu’à la CSG et à la CRDS.
Attention : l’essentiel des contrats impose une franchise de 30 jours en cas de maladie. Certains contrats prévoient une franchise de 15 jours mais leur tarif peut être nettement plus élevé.
Le risque :
Le risque est d’assurer un montant d’indemnisation trop faible ou de ne pas le réévaluer en fonction de votre niveau de vie.
Il faut que le montant de l’indemnisation permette de maintenir le niveau de revenu du dirigeant. Il faut donc revoir le montant de l’indemnisation régulièrement.
Il est prudent également de vérifier la durée maximale d’indemnisation.
Le coin conseil :
Il s’agit d’une assurance privée. Les compagnies d’assurance ne sont pas obligées de vous accepter. Chaque compagnie a donc un questionnaire de santé individuel, voire demande des visites médicales chez des médecins agréés.
En cas de maladies antérieures graves, ou de probables soucis de santé à venir, vous pouvez être refusés, ou le problème détecté ne sera pas assuré… Il faudra alors envisager une autre forme sociale pour votre société qui vous permettra de bénéficier d’une protection sociale de type salarié.
Il est donc prudent de passer les tests imposés par la compagnie d’assurance préalablement à la création de la société pour éviter de devoir changer la forme sociale de l’entreprise dans le cas où la compagnie d’assurance ne vous assurerait pas selon vos souhaits.
Le congé maternité est désormais indemnisé par le régime des TNS :
En cas de revenu d’activité annuel moyen supérieur à 3 919,20 €
Allocation forfaitaire de repos maternel :
– grossesse 3 377 €
– adoption 1 688,50 €
Indemnité journalière d’interruption d’activité pour la chef d’entreprise
– par jour : 55,51 €
Indemnité de remplacement pour la conjointe collaboratrice
– par jour : maximum 54,33 €
La protection sociale du TNS
La « complémentaire retraite »
Les artisans et les commerçants bénéficient de la retraite complémentaire obligatoire. Ce régime unique a repris les droits que les assurés avaient acquis avant 2013 dans les régimes complémentaires des artisans et dans celui des commerçants.
La retraite complémentaire se calcule en points.
Sa retraite sera donc déterminée en fonction des revenus déclarés aux caisses obligatoires.
Compte-tenu du risque de percevoir une retraite trop faible, il est possible de cotiser en sus du régime obligatoire à une retraite privée du tout nouveau PER.
Ce nouveau plan succède au PERP et au contrat Madelin (retraite), qui ne sont plus proposés à partir du 1er octobre 2020. L’épargne accumulée sur le Perp et le Madelin peut être à votre demande transférée sur le PER individuel, soit chez le même gestionnaire, soit chez un nouveau gestionnaire,
Ce contrat donne droit à des avantages fiscaux et vos droits sont transférables vers les autres PER. Il y a des cas de déblocage anticipé.
Le PER peut être débloqué en rente ou en capital ou un mixte des deux.
Le risque :
Les montants versés sont déductibles fiscalement avec un plafond annuel, de l’ordre de 4 000 €.
Le montant versé en rente au moment de la retraite varie en fonction de la table de mortalité en cours au moment du départ en retraite. Mais grâce aux heureux progrès de la médecine, la table de mortalité s’améliore : donc à fonds versés égaux, la rente sera plus faible. Certaines compagnies proposent encore des contrats à table de mortalité fixe. Mais ces derniers deviennent rares.
Le coin conseil :
La compagnie d’assurance doit être très stable financièrement afin de ne pas perdre votre placement.
La compagnie vous proposera de placer vos cotisations sur divers placements dont la rentabilité, mais aussi le risque, peuvent beaucoup varier. Il est prudent de placer vos cotisations sur des fonds dont le risque de défaillance n’est pas trop élevé.
Dans le cadre d’une création, la souscription immédiate de ce type de contrat ne semble pas impérative. Il est préférable de gagner de l’argent avant d’en placer ! Comme il s’agit d’un contrat par capitalisation, attendre quelques mois n’est pas préjudiciable. N’oublions pas que c’est une retraite par capitalisation à très long terme. Donc le décalage de quelques mois de cotisation n’est pas sensible.
Souvent le montant minimum de cotisation mensuelle est de 150 € par mois.
En création-reprise, dans un premier temps, souscrivez ce montant, vous aurez le temps de le faire progresser par la suite.
Enfin, il faut faire attention aux conditions financières du transfert de la rente au conjoint. En effet, au moment du départ en retraite, il est possible de choisir l’option « réversion au conjoint ». Cette alternative induit toujours une baisse de la rente versée.
La protection sociale du dirigeant
« L’assurance perte d’emploi »
Jusqu’en 2019, les dirigeants n’avaient pas droit à l’assurance « chômage ».
Cette dernière a été mise en place sous conditions (voir page 29).
Des compagnies d’assurance ont développé des contrats privés perte d’emploi.
Ces contrats n’assurent qu’en cas de faillite de l’entreprise.
Ces contrats sont du type « loi Madelin ». Dans la limite d’un plafond de l’ordre de 1 100€ par an, la cotisation est fiscalement déductible. Mais elle est soumise aux charges sociales et à la CSG et à la CRDS.
Les compagnies d’assurance imposent une ancienneté minimale de l’entreprise, souvent de deux ans. De plus, avant de souscrire le contrat, la compagnie d’assurance analysera les bilans de l’entreprise. Donc, si un risque de faillite apparaît, la compagnie d’assurance refusera de signer un contrat.
Le risque :
Il est impératif de bien comprendre le moment auquel la compagnie versera les fonds en cas de difficultés de l’entreprise. En effet, entre les premiers soucis de trésorerie et la clôture de la liquidation judiciaire, il peut s’écouler de très nombreux mois.
La durée d’indemnisation est également variable en fonction des contrats.
Le coin conseil :
Très rare dans la pratique. Cette assurance n’est à conseiller qu’au dirigeant dont la probabilité de retrouver un emploi salarié est très réduite.
La protection sociale du TNS
« La prévoyance décès et invalidité »
Le travailleur non salarié ne bénéficie pas de prévoyance cadre.
En cas d’invalidité totale et définitive, la pension annuelle pour un artisan ou un commerçant correspond à 50% de son revenu annuel moyen, calculé sur ses 10 meilleures années d’activité : soit entre 650 € et 1 700 €.
En cas d’incapacité partielle (perte de capacité de travail de plus de 2/3), l’assuré peut prétendre à une pension annuelle égale à 30% de son revenu moyen : entre 470 € et 1 000 € par mois.
Au décès d’un artisan ou d’un commerçant en activité, le capital est égal à 8 104,80 € en 2019 (20 % du plafond annuel de la Sécurité sociale).
Des contrats d’assurances privées du type loi Madelin permettent de pallier ce manque couverture sociale.
Juridiquement, il s’agit du même type de contrat évoqué pour les indemnités journalières.
Dans la limite d’un plafond commun avec les assurances indemnités journalières de maladie, les cotisations sont donc déductibles fiscalement. Mais elles sont soumises à charges sociales à la CSG et à la CRDS.
Le plafond dépend d’une formule compliquée : pour 21 000 € de revenus : 3 600 € environ.
Le capital de la prévoyance décès peut bénéficier à la personne de son choix.
Le risque :
Le risque est de prévoir un montant d’indemnisation mal évalué en fonction de ses besoins.
Il faut que le montant de l’indemnisation permette de maintenir le niveau de revenu du dirigeant et de ses héritiers. Il faut donc revoir le montant de l’indemnisation régulièrement.
Le coin conseil :
Comme pour l’assurance des indemnités journalières de maladie, c’est une assurance privée. Il y a donc un questionnaire de santé individuel, voire des visites médicales avec des médecins agréés.
En cas de maladies antérieures graves, ou de probables soucis à venir, vous pouvez être refusés, ou le problème détecté ne sera pas assuré…Il faudra alors envisager une autre forme sociale pour votre société qui vous permettra de bénéficier d’une protection sociale de type salarié.
De plus, le choix du bénéficiaire doit être réfléchi. Faut-il faire bénéficier le conjoint ou ses enfants ?
Enfin, en fonction des évolutions de votre vie privée (divorce par exemple), vous devez penser à faire évoluer le choix du bénéficiaire. En effet, c’est la personne inscrite comme bénéficiaire au contrat qui percevra le capital décès même si ce choix est devenu aberrant au fils des années, et même si cela prive vos enfants…
La protection sociale du TNS
« La mutuelle »
Le choix de la mutuelle maladie est libre. Le travailleur non salarié peut soit la souscrire dans le cadre d’une assurance à titre personnel, soit la souscrire par le biais de son entreprise dans le cadre d’une assurance loi Madelin.
Dans la limite d’un plafond, les cotisations sont donc déductibles fiscalement. Mais elles sont soumises à charges sociales et à la CSG et à la CRDS.
Seules les cotisations versées pour le dirigeant et ses enfants peuvent être fiscalement déductibles.
Le risque :
Il est totalement impératif d’être couvert en termes de mutuelle maladie.
Le coin conseil :
Vous l’avez compris : il est très risqué de vivre sans cette protection. Toutefois, si votre conjoint bénéficie déjà d’une mutuelle, vous pouvez peut-être en bénéficier et ne pas souscrire à un nouvel organisme.
La compagnie aura également la possibilité de vous refuser un contrat si votre questionnaire de santé ou si votre visite médicale se révèle à leurs yeux négatifs.
La mutuelle doit être choisie en fonction de ses garanties. Si vos enfants sont jeunes, il faut peut-être choisir une mutuelle efficace pour les soins dentaires. Plus tard, la mutuelle devrait plutôt assurer les frais liés à la correction de la vue…
La protection sociale du dirigeant
soumis au régime général
Les dirigeants de SA et de SAS bénéficient du régime général de la sécurité sociale. C’est-à-dire que les protections sociales de base sont les mêmes que celles d’un salarié.
Toutefois, ils ne bénéficient pas de la même assurance chômage (voir page 29).
En revanche, ils cotisent obligatoirement à une caisse de retraite cadre et à une prévoyance cadre en cas de décès ou d’invalidité.
Le régime général de la sécurité sociale s’applique quel que soit le pourcentage de détention dans le capital de la SA ou de la SAS.
Ces dirigeants peuvent souscrire par le biais de la société à :
– une retraite supplémentaire privée en plus de leur retraite complémentaire cadre ;
– une assurance chômage privée ;
– une mutuelle.
La retraite sur complémentaire privée type « article 83 » s’appelle désormais : Le « PER Entreprises » ouvert à tout ou partie des salariés en plus du dirigeant. Le montant des cotisations est fixe, sans garantie du niveau des prestations servies à la retraite.
Chaque salarié bénéficiaire dispose d’un compte sur lequel l’entreprise verse une cotisation fixe, souvent un pourcentage du salaire, éventuellement complétée par une cotisation salariale si l’accord le prévoit. Le salarié peut également, depuis la réforme des retraites du 9 novembre 2010, verser des cotisations à titre volontaire. Il y a donc 3 sources d’alimentation possibles :
– cotisations obligatoires de l’employeur ;
– cotisations obligatoires du salarié ;
– versements individuels et facultatifs du salarié, pouvant inclure des transferts de jours du Compte épargne temps (CET) ou de jours de repos non pris, dans la limite de 10 par an.
Le PER permet une sortie en rente ou en capital, un versement en cas d’acquisition de la résidence principale, une portabilité totale.
Il existe également une forme d’épargne retraite appelée « article 82 ». Le principe est très simple, l’entreprise verse de l’argent pour un salarié à un fonds de retraite privé. Ce versement est considéré comme un salaire donc taxé au niveau fiscal et social. En revanche, au moment du départ en retraite, le bénéficiaire peut obtenir le versement en une seule fois du capital constitué, sans impôt car ce dernier a déjà été payé.
Le risque :
Les retraites supplémentaires doivent être mises en place pour un collège d’individus au sein de l’entreprise. Donc, dans l’essentiel des cas, le contrat sera mis en place pour un collège cadre ou tout le personnel.
Le montant des assurances retraite, chômage et mutuelle privées payées annuellement est limité fiscalement et socialement à un pourcentage combiné du salaire brut du dirigeant et du plafond « A » de la sécurité sociale. Au-delà, l’assurance est considérée comme un complément de salaire, et donc soumise à charges sociales et impôt sur les revenus. Dans tous les cas, le dirigeant paiera la CSG et la CRDS sur ces cotisations.
Le coin conseil :
Le choix du type de protection sociale est un choix « intime ». Bien évidemment, si vous avez (ou avez eu) des problèmes de santé qui vous empêchent de souscrire à des assurances du type loi Madelin, il est impératif de bénéficier du régime général de la sécurité sociale grâce à une SA ou à une SAS.